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A la découverte d'Enghien par d'autres chemins

Le Père Jacques Reinbold

 

Jacques REINBOLD naît en 1918. Il fait sa théologie à Enghien.

 

Le Père Jacques Reinbold

A droite, le Père Jacques Reinbold - à gauche mon père - Partie de pêche

 

Durant son séjour il se fait beaucoup d’amis, dont mes parents, ma sœur, moi-même.  Mon père Franz et son ami Oscar Lippens l’emmèneront souvent à la pêche, à l’étang de Warelles, et lorsque l’occasion se présente, à d’autres endroits, comme à l’étang du Dr Marcel Devroede à Turnhout. Là, c’était la pêche au « gros » comme ils disaient, le brochet.

Le Père Jacques ReinboldJacques Reinbold est un grand ami du Père Charles de Sèze, auquel un article est également consacré sur ce blog. Ils font leur théologie à Enghien. Ils forment une réelle équipe avec les pères Duval, Duvoisin, Delhaize,...

C’est ainsi par exemple, que durant la guerre, le maire d’un village d’Auvergne demanda de jeunes jésuites pour déterrer les corps d’hommes exécutés par le maquis, les circonstances de ce « règlement de comptes » demandant, pour la paix des cœurs, que cette tâche soit assurée par des mains religieuses. Charles de Sèze le fit avec Jacques Reinbold, aujourd’hui encore missionnaire à Madagascar, homme, lui aussi, de ceux qui croient qu’on n’en a pas fait assez quand on n’a pas tout fait, qu’on n’a pas assez donné tant qu’on n’a pas tout donné (Mémorial du Père Charles de Sèze, 1986, p. 22).

En 1957, écrit Yves Delannoy, dans son article « 150 ans de vie communale à Enghien », Annales du Cercle Archéologique d’Enghien, 1981-1982, t. XX, pp. 322-326, les Jésuites quittent Enghien pour Chantilly, emportant une cloche d’Enghien et laissant ici un drapeau aux couleurs de France. Cette cloche se trouve actuellement… à Madagascar, plus exactement à Andoharanomaitso (autrement dit : A la source de l’eau verte). Cette cloche avait été donnée par le R.P. Lebrun au R.P. Jacques Reinbold, missionnaire à Madagascar, mais le R.P. Misset, Provincial, ne voulut pas qu’elle quitte la France sans l’assentiment de la population enghiennoise. Celle-ci, par la voix de son bourgmestre, fit savoir qu’elle serait très heureuse de savoir cette cloche à Madagascar en souvenir du P. Garvey qui, après s’être tant dévoué ici, s’était fait assassiner là-bas (Manampatrana) en 1947 (Renseignements aimablement communiqués et transmis respectivement par le R.P. J. Reinbold et Jacques, dit Georges Devroede). Cette cloche porte l’inscription suivante d’une part :

de 1756 à 1955, j’appartins au carillon de l’église d’Enghien

et d’autre part :

ma voix perpétuera la gratitude des paroissiens d’Enghien envers les R.P. Jésuites de la Province de Champagne 1887-1957

Cette cloche (66 kg. sans battant) avait été fondue à Bruges par G. Dumery en 1756.

 

Le Père Jacques ReinboldLe Père Reinbold est resté longtemps en contact avec ma famille. Dès qu’il rentrait de Madagascar, s’il le pouvait, Lille n’étant pas très éloigné d’Enghien, il venait nous rendre visite. Il nous parlait beaucoup de Madagascar et nous montrait ses diapositives.

Je me sentais attiré par ce magnifique pays, mais j’étais hélas trop jeune pour pouvoir m’y rendre.

Le Père Jacques REINBOLD  décède à Lille le 12 décembre 2003.

 

(Photo ci-dessus : Jacques Reinbold à l'arrière et mon père à l'avant - Photo ci-contre : de gauche à droite : Jacques Reinbold, Oscar Lippens, mon père Franz)

*****

Trois documents me restent : deux lettres venant de Madagascar et la copie d’une de mes lettres.


Père Jacques REINBOLD                                                     Andoharanomaitso, fin Décembre 1983
Fiangonana Katolika
Ambozontany
B.P. 40 FIANARANTSOA

(MADAGASCAR)

 

Très Chers,

J'ai aujourd'hui une occasion pour vous faire porter ces quelques mots et j'en profite pour bavarder librement avec vous, car par la filière ordinaire des postes, nous sommes toujours sous surveillance. Il faut faire attention à ce qu'on écrit ; c'est grave de ne pas être louangeur pour le régime en place, on vous catalogue aussitôt comme son ennemi avec toutes les conséquences qu'on vous fera supporter par la suite.

Malgré les difficultés de l'heure, bonne année pour ces douze mois dans lesquels nous allons entrer. Comme chaque aurore nous réserve ses surprises, cet an 1984 nous réserve, lui aussi, les siennes. Je demande à Dieu que pour chacune de vos familles les moments heureux se succèdent en cascade sous votre toit, cela vous aidera à avaler aussi les pilules plus amères. Concrètement, cela veut dire que mes prières, mes fatigues offertes, mes pensées affectueuses vagabondent vers vous par-dessus les océans.

Clarifions d'abord nos positions respectives, j'ai moralement besoin de le faire.

Je m'excuse de vous rappeler un fait très simple mais certain : vous tous, mes parents, mes chers amis, vous prenez de la bouteille ! Je laisse ici de côté ceux que j’ai revus à leurs treize ou quinze ans : aujourd'hui, ils pensent au service militaire et ces demoiselles à l'université ou à autre chose. Je me tourne vers vous, leurs aînés, leurs parents à la retraite ou pas encore. Est-ce que vous savez bien que nous allons ensemble vers notre éternelle jeunesse ? Personnellement, j'y crois. Mais la pente à escalader pour en arriver là est un peu dure et les sentiers différents. Pour l'un, ce sont les jambes qui commencent à poser des problèmes, pour l'autre, ce sont des rhuma­tismes fort gênants, pour un troisième, c'est autre chose. Alors, comme tout le monde, vous faites ce que vous pouvez avec ces handicaps. Vous en êtes là ? Eh bien, moi aussi. Cela prouve que nous vivons toujours au coude à coude... C'est réjouissant !

Mais pourquoi ces considérations bizarres en ce début d'année tout proche? La réponse, la voici : je suis humilié, honteux, disons pas fier devant vous. Je songe à la fable de la Fontaine "Le loup et l'agneau". "Ce sont mes rhumatismes, mes ans et le reste qui sont cause", car je n'écris plus, le soir, je suis mort. Quand j'ai cuit et avalé mon frichti, fait la vaisselle (quand il me reste du courage), je vais me coucher et c'est le bon moment de la journée. Pendant que se succèdent les affaires : réunions, conférences, visites, confessions, baptêmes, activités de toutes sortes, coopérative de jeunes, constructions, greniers à riz, le courrier s'amoncelle m'annonçant vos offrandes qui me parviennent et le remords de mon silence me cuit. Alors, en ce début d'année, je vous embrasse tous. Repartons à zéro. Je tâcherai de faire mieux en 1984. J'arrête là mes considérations sur nos ans et nos rhumatismes.

Parlons un peu de cette île dont on ne parle pas en France, nous le savons. Le contraste est saisissant. A écouter notre radio et à lire notre presse, nous sommes devenus le nombril du monde béat d'admiration devant la révolution socialiste malgache et ses réalisations. La trompette de la propagande sonne à plein tube. Quand on est sur le tas, ça ne prend pas et à l'extérieur, à Paris ou ailleurs, on doit sourire car on est tout de même renseigné. La situation est excellente pour le marché noir, pour une certaine "nomenklatura" qui s'enrichit, jouit de privilèges et vole impunément, certaine qu'elle est d'être protégée en cas d'histoires, car la corruption part de très haut et se répercute jusqu'à la base. Aucune justice ne peut être rendue. Le tueur, s'il donne le pot de vin, revient tranquillement chez lui et gare à ceux qui ont osé lui créer des ennuis car la vengeance sera terrible. Ce sera le meurtre. Le pays est dans la pourriture et l'anarchie totales. Toutes les structures ayant éclaté, seules restent comme autorités les bandes de pillards, comme cela s'est produit chez nous au moment de la guerre de cent ans. Parmi les derniers faits caractéristiques, en voici deux : une bande a encerclé de nuit une case toute proche de chez moi. La maman y était seule avec ses neuf enfants. Ils furent tous tués à coups de sagaie et la maison brûlée. On a retrouvé la maman couchée, bras étendus sur les corps calcinés de ses neuf enfants. Le 12 Décembre dernier, au matin, on transporta devant chez moi le corps d'un notable d'une de mes paroisses. Son corps était couvert de sang noir coagulé. Il avait été attaqué de nuit dans sa maison et abattu à coups de hache sur la tête, à l'épaule et au bras gauche. Il doit être mort aujourd'hui. Chaque nuit, ou à peu près, amène son lot de vols, de blessures ou de meurtres. L'armée étant venue occuper la région, nous avons eu une accalmie de deux ou trois mois. Elle est maintenant partie et cela recommence de plus belle.

Est-ce que tout cela est voulu ? Le pays est déstabilisé, mais qui a intérêt à cette déstabi­lisation ? Nous entrons là dans la brume, dans le domaine des "peut-être". Certains faits sont cependant inquiétants. La pénétration russe est en progrès constant dans les universités, les services de coopération. Un consulat russe s'est ouvert à Tamatave avec plus de cent ressortis­sants à son service. Il faut sans doute en ce domaine établir un lien avec la tension dans le Golfe Persique, la présence d'une base américaine dans l'île de Diego Garcia située entre la pointe sud de l'Inde et la pointe Nord de Madagascar, la présence russe sur la côte africaine et à Madagascar. Le malheur de l'océan indien est d'être le lieu de transit du pétrole. En cas de conflit, Madagascar risque d'être broyée par les bombes. Telle est la situation présente. Il n'est pas improbable que la situation anarchique régnant dans l'île soit le premier acompte de la facture de la guerre du pétrole. La situation de l'île n'est-elle pas voulue pour que puisse s'implanter au jour J un régime plus dur et lié inconditionnellement à Moscou. La situation stratégique de l'île est importante pour les grandes capitales, les autres choses, la production de café ou de girofle, ou même la vie des Malgaches, ne pèsent guère à leurs yeux. Le crime à l'égard des Malgaches est d'avoir inséré leur nation dans un des blocs des puissances meurtriè­res. En cas d'apocalypse, les Malgaches entreront dans l'histoire du passé.

Peur nous, il s'agit qu'envers et contre tout l'évangile du Seigneur brille, par la prière, les églises, les oeuvres charitables de toutes sortes et l'exemple de vie des croyants. Là est l'espérance. Grâce à Dieu, les communautés chrétiennes sont là, magnifiques. Me trompé-je? Après trente-trois années passées à Madagascar, j'ai l'impression d'être soudé plus que jamais avec le peuple de Dieu : nous subissons ensemble, nous travaillons ensemble. Je reçois souvent de mes gens des leçons de dévouement et de travail bénévole au service de l'Eglise assaisonnées d'une gentillesse et d'une délicatesse qui ne peuvent que toucher...

C'est une lettre trop rapide pour ce qu'il y aurait à raconter. La suite sera pour l'époque de nos retrouvailles. Quand ? ... Proches si la carcasse craque, plus 1ointaines si vos prières me permettent de tenir le coup…

Mais sachez que dans ce pays où je suis et où on nous répète de tous côtés que nous sommes des étrangers, "des étrangers dans la maison de mon Père", je pense à vous près de qui je me sens chez moi. D'où la tentation de vous retrouver. Priez pour que je ne succombe pas à cette tentation.

Je vous dis toute mon affection.

Jacques REINBOLD.

___

 

Charles GHILAIN                                                                                                                         Le 16 avril 1984.
Rue Benjamin Lebrun 27/6
B-139l  ENGHIEN (Petit-Enghien)

Père Jacques REINBOLD
Fiangonana Katolika
Ambozontany
B.P. 40 FIANARANTSOA
MADAGASCAR

 

Très cher Père Reinbold,
Très cher ami Jacques,

Nous avons bien reçu ta lettre de bons voeux pour 1984, que tu as transmise via la Procure des Missions en décembre 1983. Nous souhaitons que tout finisse par s'arranger de manière à ce que tout le monde soit heureux. Que 1984 réponde également à tous tes souhaits.

Afin d'être sûr que cette lettre te parvienne, je l'ai expédiée par deux voies, la directe et celle de la Procure des Missions à Lille. Tu la recevras dès lors peut-être deux fois.

Il est vrai que je ne t'ai écrit que rarement. Tu dois te dire que j'ai sûrement d'importantes nouvelles à t'annoncer. Oui, c'est vrai, mais elles sont tristes. Papa est décédé le 2 février dernier, à l’âge de 77 ans, alors que tout semblait aller au mieux. Le sort a frappé. Il est aussi écrit: « Vous ne savez ni le jour ni l'heure ». Oui, Franz n'est plus.

Ce mercredi 1er février, comme tous les autres jours, papa s'est rendu "en ville" pour y faire sa randonnée habituelle. Il a déjeuné comme jamais, a passé l'après-midi sans le moindre problème, a diné et s'est cou­ché normalement. C'est vers 1h du matin que le mal s'est déclaré : un oedème pulmonaire. De suite le médecin fut sur place et décida de faire transporter papa en clinique pour qu'il puisse bénéficier de tous les soins nécessaires. Tout fut fait. Mais, que veux-tu, le coeur ayant déjà souffert plus d'une fois, il ne put résister à ce nouveau choc. Papa s'est éteint calmement auprès de Françine et de moi-même vers 4h du matin. Papa a été inhumé le samedi 4 février à la pelouse d'Honneur près de ses camarades prisonniers de guerre. La cérémonie religieuse fut telle que papa l'eût désiré : simple mais avec tous les amis. Et ce fut ainsi : l’église était comble et les honneurs furent rendus par les anciens prisonniers de guerre et les Pompiers Volontaires d'Enghien et d'Orbec-­en-Auge (Calvados), ainsi que de nombreux autres Corps de Pompiers de la région.

Maman, qui t'embrasse, semble bien supporter cette dure épreuve. Elle est réconfortée par notre présence quasi constante, d'autant plus qu'elle a besoin de soins réguliers au point de vue diabète (piqûres d'insuline matin et soir).

Tu nous excuseras de ne pas avoir donné de nouvelles plus tôt. Je n'en ai pas eu le courage avant ce jour et je m'en veux d'ailleurs. Tu seras toutefois d'accord qu'il ne s'agit pas d'une lettre facile à écrire.

A la lecture de ta lettre nous constatons que, comme dans la plupart des pays du monde, il y a actuellement beaucoup de problèmes, et qu'ils sont loin d'être résolus. Ce genre de situation n'engendre généralement que chaos et misère. Les plaies sont souvent inguérissables. Que pouvons-nous faire de valable pour vous en dehors de la prière? Bien sûr, l'argent est toujours plus ou moins facile à trouver. Vois-tu, j'aimerais que les Enghiennois se souviennent un peu plus de leurs Jésuites français qu'ils ont tant appréciés et aimés. Je discuterai du problème avec le clergé d’Enghien avec lequel j'ai de bons rapports puisque je suis organiste à la paroisse. Le curé-doyen, l’abbé Jean Knauff, est mon ancien professeur de mathématiques au Collège St-Augustin. Je suis certain qu'il aura une oreille attentive. Il faudrait également que les Jeunes se mobilisent et comprennent combien il est important qu'ils interviennent.

J’espère que ta santé continue d'être bonne pour que tu puisses encore te consacrer à ce magnifique pays que j'aurais tant voulu voir.

Fais-nous donc parvenir bientôt de tes nouvelles.

Nous t'embrassons tous très fort et prions pour toi.

                                                                                                                                                               Charly.

 

P.S. Le bonjour d'Oscar, de Raymonde et de maman Marguerite, qui pensent souvent à toi.

___


 

P. Jacques REINBOLD                                                                                               Andoharanomaitso, Janvier 1985
E.C.A.R.
Ambozontany
B.P. 40 - 301  FIANARANTSOA
(Madagascar)

 

 Chers Parents et Amis,

L'année nouvelle est dépassée et me voici seulement ! Cependant, Dieu sait que mes pensées vont vers vous tous dont j'épèle les noms dans ma tête et dans mon coeur. Pardonnez à votre oncle, grand-oncle, parent ou grand ami ; je dois être victime de l'âge, des circonstances aussi.

Ces premiers mots que je vous adresse en ce début d'année frisent les larmes. Ce n'est pas gai pour une nouvelle année ! Oui, mon Bernard, jeune père de famille de trois petits enfants, celui qui chaque jour était avec moi, je l'ai enterré hier : décharge de chevrotine dans la tête, le cou et la poitrine. En huit jours, 4 blessés par chevrotines, deux blessés par coups de hache et je ne parle pas de maisons brûlées. Nous vivons un nouvel an rouge de feu et de sang. Cet après-midi, nous partons aux cibles avec mes jeunes, pour les habituer au chargement et coup de feu rapides ; un autre exercice est le lancement de la sagaie (le javelot) sur pantin de paille. Une partie de nos nuits se passe sous les étoiles ou sous la pluie ... vous êtes un monde très aimé et très lointain! Qu'est­-ce que je suis venu faire dans ce fichu pays ? Prêtre, donc par vocation porteur de la bonté et du pardon, je me retrouve à mon âge dans la violence. Seule médita­tion pacificatrice : le temps des moines chevaliers ; l'ennui est qu’il faudrait avoir 20 ans de moins car tout cela fatigue énormément, pas assez de sommeil, les nerfs en prennent un coup.

Alors : pardonnez-moi ! Saudrupt est dans mon coeur, j'y ai pensé mille fois, je sais, je sais ! et je souffre avec vous. Mais ici, je suis esclave de mes gens, des circonstances, de l'âge. Quelle joie et quelle peur de dégager ! Quelle joie ! : Celle de sortir d'ici pour vous retrouver, vous embrasser. Quelle peur ! Comment abandonner ceux qu'on aime dans la situation tragique où ils se trouvent? Il y a là un problème que je n'arrive pas à résoudre. Théoriquement, je devrais revenir en France. Ce n'est pas sûr pour deux raisons : arriverai-je à me séparer de mes gens ? et serai-je encore en vie cette année? Bernard et d'autres sont morts, l'accident peut très bien m'arriver. A titre de renseignements, voici le palmarès d'Andoharanomaitso du 1er au 14 Janvier 1985 : 4 blessés par armes à feu: 1 tué : Bernard ; 132 zébus volés ; 13 maisons cambriolées par des bandes de bri­gands, 12 maisons incendiées. Ne sont pas mentionnés dans cet inventaire officiel les blessés et exactions qui ont eu lieu sur une partie de mes paroisses relevant du Canton de Mahazoarivo.

Pour terminer ce tableau sombre, il faut que vous sachiez qu'il y a trois mois, ils ont assassiné cruellement dans sa chambre le Frère Roy, frère du Sacré-Coeur, Canadien d'origine. Qu'on vient de dépecer vivant, dans les premiers jours de Janvier, entre Tananarive et Moramanga, le père Carme Italien Sergio Sorgon, Vicaire épiscopal du Diocèse d'Ambatondrazaka et responsable de la paroisse du Sacré-Coeur à Moramanga. Il fut attaché à l'arbre de torture et a mis vingt­-quatre heures, semble-t-il, à expirer ; lorsqu'on a retrouvé la loque de son corps, il était encore souple ; la moitié de son crâne n'a pu être retrouvée ; il a été découpé au-dessus de la mâchoire inférieure.

Etre témoin de Jésus-Christ ! Il est des circonstances où cela est très difficile. L'Evangile vivant dans le coeur est contredit par la réalité cruel1e, à laquelle il faut faire face.

Je vous ai tracé en bref l'image qui révèle l'état où est tombé ce pays. Tout ce que peuvent vous seriner les radios, c'est du baratin : le peuple souffre, le peuple a peur, le sous-développement progresse à grands pas. Tel est le point où est arrivé le Madagascar 1985.

Ces quelques mots suffisent… Oui, Bonne Année, que le Seigneur vous garde en santé, et nous avec, si possible ! Si nous nous revoyons sur terre, ce sera une grande joie !

Je vous dis toute mon affection.

 

P. Jacques REINBOLD, s.j.

 

 

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