A la découverte d'Enghien par d'autres chemins
Dans notre monde moderne, Noël est devenu une fête où la tradition et les rites du passé sont quelque peu oubliés. Toutefois le sapin décoré ployant sous le poids des guirlandes reste le signe tangible d'une tradition qui trouverait son origine dans les célébrations païennes celtiques où l'on embrasait un sapin pour pallier l'insuffisance des rayons solaires. Le premier sapin de Noël fut celui de la ville de Strasbourg en 1605.
Mais quelle est l'origine de cette coutume qui consiste à manger des cougnoles le jour de Noël ? En fait, nous trouvons ce pain anthropomorphe à la devanture des boulangers dès la fin novembre. L'aire géographique de ce gâteau englobe la Belgique, le Nord de la France, la Picardie, la Lorraine et la Bourgogne. Les formes varient cependant d'une région à l'autre.
Les appelations elles aussi varient depuis la fin du Moyen-Âge, mais se rapportent à deux racines étymologiques latines: cuneolus et conchylium.
Le premier de ces étymons signifie petit coin, d'où dérivent cogna, cuignet en Picardie, queugnot, queugnet et koene en Artois. Dans le Nord de la France, par contre, nous découvrons les dénominations cougnou et couniole.
Cependant, dans les mêmes zônes géographiques, se rencontrent le mot coquille, -dérivé de conchylium-, par exemple dans les régions d'Ath et de Tournai.
En 1621, les maîtres et confrères du métier des boulangers d'Enghien, adressent à Anne de Croy, une requête en vue de renouveler leurs statuts. L'énoncé des variétés de pains qu'ils sont censés travailler comporte la coquille, qui pourrait bien désigner la cougnole, sans pouvoir affirmer qu'il s'agit bien de ce pain pétri uniquement pour la période de Noël. Le 21 février 1724, le Conseil Noble de Hainaut homologue les statuts accordés par la duchesse, en ce compris la fabrication de coquilles.
En 1700, les statuts des boulangers, -octroyés par la duchesse d'Arenberg, Marie-Henriette d' Alcaretto-, mentionnent des Couques à Cornes.
La forme de la cougnole que nous connaissons aujourd'hui à Enghien, trouve son origine dans les régions de Leuze, Antoing et dans le Centre, où on l'appelle le Marmot. Elle représente un enfant emmailloté, d'où son autre nom de pain de Jésus. Mais à Enghien, ces Marmots s'appelaient aussi Bonshommes ou Halfvastman. Encore de nos jours, ils font l'objet de concours de cartes, -les Frienskeman-, à Frasne et Ellezelles.
Jusqu'au lendemain de la première guerre mondiale, les boulangers d'Enghien, Bascour et Dutilleux, préparaient ce type de pâtisseries pour certains cafés, dont Mathot, sur la place du Vieux Marché. La bûche de Noël n'est apparue que plus tard sur les tables de fêtes.
Quant aux ronds de plâtre multicolores décorant les cougnoles, ils trouvent sans doute leur origine dans la partie néerlandophone du pays où on les désignait sous le nom de Patacon, nom d'une monnaie hollandaise des siècles passés. Ces pièces arrivaient chez nos boulangers en provenance de Mons, Baudour ou Nimy. Cette tradition de placer des ronds sur la cougnole, serait apparue à la suite des difficultés financières rencontrées par les familles, qui en lieu et place de la pièce de monnaie offerte à l'enfant, pour ses étrennes, durent remplacer cette dernière par un morceau de plâtre décoré.
Jean Leboucq.
Bulletin du Cercle Royal Archéologique d'Enghien - 3/94 - n° 2 - mars 1994 - pp. 23-25.
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