A la découverte d'Enghien par d'autres chemins
L'abbé Jean-Pierre Huvelle
L'Abbé Jean-Pierre Huvelle, a été ordonné prêtre le 26 juin 1978.
Il a été conseiller religieux fédéral de l'Union internationale des guides et scouts d'Europe de 1982 à 1986, et conseiller religieux de la IVe Mons.
Il a notamment été président des unités pastorales de Belœil et de Charleroi.
Il est nommé doyen d'Enghien en 1989, suite au départ de l'abbé Michel Dayez en qualité de doyen d'Ath.
Soi-disant mis brutalement à l'écart par Mgr Harpigny, évêque de Tournai, l'abbé Benoît Lobet affirme que ce prêtre, en effet remarquable, a été, à sa demande, déchargé de sa mission pour pouvoir se soigner correctement – il est en effet affligé par une santé plus que précaire (*).
(*) Les vocations dans le diocèse de Tournai (2) - Dans "Riposte catholique" - 28 septembre 2011
Jean-Pierre Huvelle est doyen émérite d'Enghien, dans le diocèse de Tournai. Il résiderait actuellement au Canada.
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Homélie de M. l’abbé Jean-Pierre HUVELLE, Révérend curé-doyen d’Enghien
Funérailles de Madame Marie-Thérèse PACCO, veuve de Louis ISAAC
(Enghien, 9 déc. 1912 - Enghien, 18 juil. 1994)
Tous ont ici conscience de ce que c'est une âme proche de Dieu qu'aujourd'hui nous lui confions. Elle était de ceux et de celles pour lesquels il est vital d'être un sarment relié à la vigne, un chrétien relié au Christ.
La grâce aidant, les fruits spirituels ne se font alors pas attendre, et ils sont nombreux ceux que produit une vie de foi généreuse et altruiste.
Si elle était - et avait le souci d'être - sur le plan chrétien reliée à la vigne, comme tout bon sarment doit nécessairement l'être, elle l'était aussi au niveau de sa famille. Très attachée aux siens, elle avait incontestablement ce souci de tenir sa place parmi les membres de sa famille. Ils comptaient pour elle et elle comptait pour eux.
Saluons donc cette cohésion qui fera que Madame Thérèse Isaac sera au niveau de sa famille, comme elle le sera plus largement, une personne qui compte aux yeux des siens, on pourrait dire un personnage, au sens noble de ce terme.
Mais, plus largement encore, ce sont en quelques sorte tous les Enghiennois qui étaient sa famille, une immense famille spirituelle à laquelle elle a donné beaucoup d'elle-même, à laquelle elle a même, devrait-on dire, consacré tout son temps et tout son être. Ceux qui le pouvaient, sont venus aujourd'hui, nombreux, pour la saluer une dernière fois, lui exprimer leur reconnaissance et prier pour elle et avec elle.
Ceux qui le pouvaient, dis-je, car ils sont nombreux aussi ceux qui sont incapables de se déplacer et qui, grâce au service d'Aide aux foyers de Madame Isaac pouvaient en toute quiétude rester chez eux, aidés à domicile par un personnel zélé et compétent qui, lui aussi, est ici présent aujourd'hui et qui a conscience de devoir beaucoup à la guidance de Madame Isaac.
Les administrateurs de l'A.S.B.L. “Aide aux foyers" que Madame Isaac avait créée, et le personnel de ce service sont conscients du fait que la bonne santé morale et financière de cette institution reposait, pour une large part, sur le travail inlassable - et bénévole - de Madame Isaac.
Elle a certainement, en ce domaine, voulu faire preuve de fidélité à la mémoire et au testament spirituel de Monsieur Louis Isaac.
Si je me suis étendu sur le travail accompli au sein de l'Aide aux foyers, c'est parce que ce service était devenu toute sa vie et que grande est la reconnaissance que la Communauté enghiennoise doit lui vouer à cet égard.
Si ce service s’occupait surtout de personnes âgées et malades, l’attention de Mme Isaac se portait aussi sur les enfants. Elle était présidente de la section d’Enghien de l’O.N.E., et chacun sait qu’à ce titre elle a également beaucoup œuvré pour ces nourrissons qui, tout petits, ont encore tout à recevoir de la vie et de la société. Je rappellerai que les communautés marquoise, hovoise et petit-enghiennoise, et d’autres encore étaient concernées par les engagements de Mme Isaac dont il vient d’être question, et lui manifestent, elles aussi, leur reconnaissance.
La Communauté petit-enghiennoise peut notamment s’enorgueillir d’avoir pu compter sur la sollicitude de Mme Isaac. Je pense notamment au fait qu’elle avait accepté le titre de Présidente d’honneur de l’Amicale des Pensionnés du Bon Vieux Temps. Je sais à quel point elle appréciait la bonne santé de cette amicale et lui accordait son attention et sa sollicitude.
C’est enfin la Paroisse qui se doit de la remercier, elle qui fit assidûment partie de l’équipe des Visiteurs de Malades. Là aussi, elle fut entière et cohérente avec elle-même, assistant modestement aux réunions et y prodiguant de judicieux conseils.
Quant à la Fraternité des Malades et Handicapés, émanation de l’équipe des Visiteurs de Malades, elle se souviendra de celle qui, non seulement était présente à toutes les réunions de la fraternité, mais qui, en outre, véhiculait à qui mieux, ceux et celles qui avaient, pour s’y rendre, besoin d’un transport.
Epinglons aussi les services à la bibliothèque. Là aussi, son assiduité mérite d’être soulignée.
Mais je dois en rester là, conscient d’avoir dû m’en tenir à l’évocation de quelques engagements essentiels et connus de tous. Ce qui ressort de tout cela, c’est l’image d’une personne digne, généreuse et grande, d’une personne que le temps semblait devoir n’avoir nullement affectée, sans doute parce que, dans une logique de grandeur et de don de soi, elle avait appliqué sans prétention mais avec fermeté, la seule recette qui défie le temps, celle qui consiste à consentir à le perdre pour le gagner tout entier pour les autres.
Aussi, au soir de sa vie, peut elle dire comme St-Paul le disait à Timothée: “Le moment de mon départ est venu : j’ai combattu jusqu’au bout le bon combat ; j’ai achevé ma course ; j’ai gardé la foi”.
Gardons-là, nous aussi, cette foi chrétienne de notre baptême, à laquelle vient tout naturellement se relier l’espérance, celle de la Résurrection des justes, celle de notre propre résurrection, vers laquelle nous nous efforçons de marcher pour rencontrer un jour le regard de Dieu, et nous retrouver enfin parfaitement unis les uns aux autres dans la joie du Ciel.
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Homélie de M. l’abbé Jean-Pierre HUVELLE, Révérend curé-doyen d’Enghien, curé d'Hoves
Funérailles de M. l'abbé Henri TEMPERMAN
(Schaerbeek, 17 janv. 1901 - Neufvilles, 3 nov. 1994)
“Une longue vie, c'est une grande grâce ”. Cette phrase du Pape Pie XII, elle-même inspirée de la Bible, l'abbé Henri Temperman l'avait faite sienne.
Et, cependant, il n'aspirait pas à vivre indéfiniment, mais plutôt à être repris par Dieu quand Lui, le Souverain Maître, le jugerait bon. C'est là, en fait, la véritable sérénité chrétienne, celle qui consiste à s'en remettre paisiblement à Dieu.
Il m'est arrivé rarement de rencontrer dans ma vie un homme aussi brave devant la mort, aussi confiant, aussi humble. Chaque fois que je venais le voir à Neufvilles, il me disait : “Je suis prêt, le Seigneur peut venir me prendre”.
Mais nous évoquons là les dernières années d'une vie qui en compta beaucoup, et il convient que notre regard se porte sur l'ensemble de cette vie de choix, de cette v\e de service qui fut celle de Monsieur l'abbé Temperman.
C’est à Schaerbeek qu’il naquit au début de ce siècle. Ce premier détail biographique m’amène d’emblée à évoquer l'esprit de service et d’abnégation de Monsieur l’abbé Henri Temperman. Car, si c’est dans la région bruxelloise qu’il fit ses études, et se prépara à devenir prêtre, c’est dans le diocèse de Tournai qu’il demanda à être envoyé. La raison en est simple: à l’époque, dans les années trente, le diocèse de Tournai manquait de vocations. Il était considéré en Belgique, déjà, suis-je tenté de dire, comme une terre de mission. Il sembla donc à l’abbé Temperman que son devoir était d’aller là où on avait le plus besoin de prêtres. Il a toujours eu, reconnaissons-le, un grand esprit missionnaire. Celui-ci s’affirmait déjà, il y a plus de cinquante ans, par le choix de son diocèse d’élection.
Évoquons brièvement les lieux où il servit durant les premières années de son ministère: l’école normale de Braine-le-Comte, les paroisses de Vaulx, Vieux-Vielsart, Boussu, Gosselies, Beaumont, et notamment Leval-Chaudeville. Mais c’est à Hoves qu’il resta de loin le plus longtemps, puisqu’il y fut curé de mai 1945 à septembre 1992.
La paroisse dont j’héritai à cette date, était une paroisse spirituellement saine. Je lui en sais gré ; le fait de lui succéder ne fut pas une charge, mais un honneur. Qu’il me soit permis de dire ici que c’était un homme que j ’appréciais, et je sais que je suis loin d’être le seul. Ce qu’il y avait lieu d’admirer le plus chez lui, c’était cette rectitude intellectuelle qui le caractérisait. Il a connu au cours de sa vie bien des événements. Déjà, au cours de son adolescence, la première guerre mondiale. Dès les premières années de son ordination, la crise des années trente, dix ans plus tard, la seconde guerre mondiale, et plus récemment, dans un autre registre, il est vrai, le Concile Vatican II. La dernière chose qui l’ébranla, fut certainement le fait de devoir quitter Hoves, paroisse qui lui était chère. Il prit lui-même la décision de se retirer lorsqu’il se rendit compte lucidement que ses forces commençaient à l'abandonner. C’était un homme qu’une austérité quasi-légendaire avait maintenu en bonne santé, mais l’âge aidant, de petites défaillances survinrent, les unes après les autres : la vue, l’ouïe, la voix, choses bien nécessaires dans le ministère pastoral.
Je viens de souligner sa rectitude intellectuelle et son sens de l’ascèse, je me dois aussi de mettre en valeur sa piété.
Il se nourrissait de la prière et des sacrements comme d’une indispensable et bienfaisante sève. Puisse-t-il rester, à cet égard, un exemple à suivre pour les générations actuelles et à venir. Soulignons aussi son zèle, le zèle avec lequel il parcourait sa paroisse, avec sa photogénique 2 CV, puis, lorsqu’il dut se résoudre à l'abandonner, à pied, aussi loin et aussi longtemps qu’il le put.
Elles sont encore nombreuses à Hoves, les personnes âgées, les malades, les paroissiens de tous âges, à avoir reçu sa visite pastorale, et à lui en savoir gré.
A côté de ses tâches pastorales, il avait ses hobbies et ses passions. Mais des hobbies et des passions centrées sur Dieu et sur autrui. Ne fit-il pas, avec ses talents de sculpteur et d'ébéniste, des autels, des chaires d'église, et d'autres choses encore ? Ne mit-il pas ses talents d'historien au service de ses paroissiens, notamment à Beaumont et ensuite à Hoves.
Il écrivit des notices historiques dans le journal Dimanche, et ses articles étaient passionnants ; il fut de bon cœur membre de sociétés hovoises et enghiennoises, notamment le Cercle Archéologique d'Enghien et l'Amicale des Pensionnés d'Enghien. Pour tous les membres de ces groupes et de beaucoup d'autres, il restera un homme qu'on n'oublie pas. Pour les chrétiens des paroisses au sein desquelles il fut envoyé, il restera un pasteur zélé, humble et droit. Comme tous ceux qui l'ont connu, je me souviendrai de son modeste sourire, si révélateur de sa personnalité, de l'humour avec lequel il savait faire passer tant de choses, sachant, ce qui fait parfois du bien, rire, à bon escient, des autres, mais aussi de lui-même.
Il avait aussi un côté de sa personne qui était caché, pudique, et forcément insoupçonné. C'était son sens de la famille. Ses nombreux neveux et nièces pourraient en témoigner. Les nombreux faire-part de naissances, de mariages, de décès, qu'il a conservés près de lui à Neufvilles, jusqu'au jour de sa mort, en témoignent aussi.
Bref, qu'il s'agisse du jeune prêtre jouant au football avec les jeunes, en soutane, bien sûr, comme cela s'imposait en ce temps-là, qu'il s'agisse du prêtre de l'après-guerre, courageux, évangéliquement austère, égal à lui-même, célébrant inlassablement, parcourant son vaste territoire que ce soit à vélo, en voiture ou à pied, qu'il s'agisse du missionnaire qui a aidé, souvent de sa poche, tant de missionnaires et tant de missions lointaines, qu'il s'agisse aussi et surtout de l'homme de foi et de prière, il est celui que le Père, nous en sommes sûrs, accueillera en son Royaume et récompensera parce qu'il fut, toute sa vie durant, un bon et fidèle serviteur.
Aujourd'hui, nous l'accompagnons de notre prière, puisse-t-il prier inlassablement pour ses successeurs et pour les chrétiens des paroisses qui lui furent chères, chrétiens d'aujourd'hui et de demain qui doivent se sentir appelés eux aussi, chacun, à transmettre là où ils sont, le flambeau de la foi, de génération en génération, jusqu'à la fin des temps.
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Homélie de M. l’abbé Jean-Pierre HUVELLE, Doyen d’Enghien
Funérailles de M. Yves Delannoy
(Enghien, 13 septembre 1920 - 12 mars 2005)
Aujourd'hui, je n'ai pas perdu un ami. J'ai perdu mon meilleur ami Si c'est cela que j'ai tenu à dire, ici, d'emblée, c'est pour deux raisons. La première, c'est parce que c'est vrai et que cela devait être dit. La seconde, c'est parce que je suis convaincu qu'en ce moment même beaucoup ici pourraient et voudraient dire la même chose. Et si nous étions - si nous sommes - nombreux à nous sentir proches de lui, ce n'est pas seulement parce qu'il était jovial et ouvert, c'est aussi parce qu'il était proche de tous.
Monsieur Delannoy, vous avez été grand. Il y a d'ailleurs, parmi ceux que l'on peut qualifier de la sorte, plusieurs types d'hommes. Il y a parmi les distinctions possibles, ceux qui aiment à être devant les autres, et qui recherchent consciemment ou non, les encensements ou les photos - c'est selon - et il y a ceux qui sont grands simplement parce qu'ils n'ont pas d'autre but que de servir : servir la société, et servir les autres. Assurément, vous avez fait partie de la seconde catégorie : vous cherchiez à servir plutôt qu'à être servi, à donner plutôt qu'à recevoir... Certains sont grands par le cœur, d'autres par l'esprit, d'autres enfin par leur dévouement. A cet égard, vous étiez les trois à la fois : grand par le cœur car dans le vôtre, il y avait de la place pour tout le monde, parce que vous fûtes un homme d'esprit, dans toutes les acceptions de ce terme, grand enfin par votre dévouement, parce que votre disponibilité était sans limite.
Il vous arrivait régulièrement de passer me voir, nous bavardions alors à cœur ouvert, et un jour, dans ce souci qui était le vôtre de prodiguer sans cesse des encouragements, vous m'avez dit: « Mais comment faites-vous pour prononcer des homélies de funérailles différentes pour chacun, alors que vous êtes amené à en prononcer des centaines ? » Je vous fis part alors de ma manière d'appréhender les choses et de rencontrer les personnes, et je me souviens d'avoir ajouté en guise de boutade : « En tout cas, si je suis amené à prononcer un jour l'homélie de vos funérailles, je ne devrai pas creuser beaucoup pour trouver des choses à dire. » Et c'est vrai qu'on pourrait parler longtemps de ce que vous avez été et de ce que vous avez fait. J'ai rédigé des dizaines de pages ces jours derniers y reprenant tout ce que j'avais envie de dire dans cette homélie, mais là ne résidait pas la difficulté. Elle m'est apparue ensuite, au moment d'opérer une sélection drastique de mes propos pour les ramener à une homélie d'une durée raisonnable. C'est vrai que vous avez fait tant de choses... Un jour je me rappelle vous avoir dit aussi « Même si vous viviez 500 ans, vous n'arriveriez pas à terminer tout ce que vous avez envie de faire... » Vous n'avez pas vécu 500 ans, mais 84 années tout de même qui furent exceptionnellement remplies, tant quantitativement que qualitativement...
Que de services n 'avez-vous pas rendus ! Votre disponibilité était légendaire. Nous sommes nombreux à en avoir abusé. Je voudrais même, en mon nom propre et au nom de beaucoup d'autres, demander aujourd'hui à Madame Delannoy et à ses enfants d'excuser la désinvolture avec laquelle nous avons accaparé un époux et un père qui se faisait un devoir d'être tout à tous.
Entrons dans le vif du sujet... et citons dans un total désordre, quelques uns de vos engagements, demandons-nous surtout pourquoi vous acceptiez de rendre tel ou tel service ou de présider telle ou telle société. Car sur ce point, j'ai ma petite idée... Pourquoi avez-vous, par exemple, présidé longtemps la fanfare d'Enghien. Par amour de la musique sûrement, mais surtout, je crois, parce qu'il s'agissait là d'une société qui contribue à souder une communauté, la communauté enghiennoise qui vous était chère. Vous nous aidiez à comprendre aujourd'hui que nous sommes une communauté. Au-delà des sensibilités et des différences de toutes sortes, au-delà des inévitables clivages politiques, philosophiques, religieux ou autres, ne sommes-nous pas, comme vous teniez tant à l'être, les membres d'une vaste communauté de gens de bonne volonté qui essayent de construire, selon leurs capacités et fidèles à leurs convictions, leur bonheur, tout en contribuant à celui des autres ? Vous étiez d'ailleurs aussi ouvert et à l'aise avec ceux qui partagent la foi chrétienne qu'avec ceux qui ne la partagent pas... Cette ouverture, c'est aussi, pour nous tous, qui que nous soyons, un appel à nous comprendre et à nous respecter les uns les autres.
Pourquoi avez-vous accepté d'être président d'honneur de l'Amicale des Pensionnés du bon vieux temps de Petit Enghien ? Sinon parce que c'était là aussi une association sympathique et dynamique que vous estimiez ne pas pouvoir refuser d'encourager à continuer de créer des liens entre tous, et d'entretenir un climat de véritable chaleur humaine ? N'y avait-il pas de cela aussi dans votre insertion au sein de la Double, et au Serment des Arbalétriers, sans parler de cet autre aspect qu'est celui de sympathiques traditions à respecter et à promouvoir... Venons-en à l'institution qui occupa une si grande place dans votre cœur : la bibliothèque. Vous l'avez enfantée, soutenue, développée... Vous avez retroussé vos manches pour la déménager à deux reprises, vous avez été un modèle de régularité aux jours et heures de permanences... Vous avez guidé et conseillé tant d'étudiants à la recherche de l'ouvrage approprié à leurs besoins. N'était-ce pas là encore le souci de servir qui prévalait, l'envie de partager votre savoir, de permettre à d'autres de découvrir tant et tant d'œuvres dont la lecture ne pouvait leur être que bénéfique. Et cette dernière mutation que la bibliothèque allait devoir connaître, puisque c'est ainsi que les choses doivent se concevoir aujourd'hui, vous l'avez menée à terme, avec cette fois encore ouverture et discernement.
Le Cercle Archéologique lui aussi ne vous doit-il pas beaucoup, pour ce que vous y avez fait, ce que vous lui avez apporté. Vous étiez à cet égard de ceux qui désiraient que rien ne s'oublie, que tout soit relaté, consigné par écrit et porté à la connaissance de générations à venir... Vous étiez d'ailleurs ce que j'appellerais volontiers la mémoire vivante de la communauté enghiennoise... Et c'est sans nul doute dans ce même esprit que vous étiez le garant des archives de la Ville, des Archives d'Arenberg, comme Monseigneur l'a rappelé tantôt... Et si, pour aborder maintenant votre amour du patrimoine sous toutes ses formes, que le passé nous a légué, ce n 'est pas simplement par nostalgie, ou même par amour du beau et de l'ancien que vous en défendez la sauvegarde, c'est aussi et surtout - et c'est encore une chose que vous nous rappelez parce que, derrière tout ce qui est patrimoine, il y a l'âme de ceux qui nous l'ont légué. Il y a de la sueur, du sang peut être, de l'amour en tout cas, qui ne peut nous laisser indifférent ni sombrer dans l'oubli. Votre attachement à notre procession de la Saint Jean relevait sans nul doute aussi de cette même intuition. Votre intérêt pour la restauration de nos grandes orgues relève également de la même logique.
Et voici que nous touchons aux engagements que vous eûtes au sein de la paroisse. On ne sait peut être pas assez que vous avez présidé à la destinée d'une demi douzaine d'asbl, paroissiales ou décanales, au sein desquelles il y avait les bâtiments qui abritaient et abritent encore des écoles, des mouvements de jeunes et d'adultes, et d'autres associations. Sait-on par exemple que le Monastère des Clarisses dont les religieuses firent, grâce à vous, cadeau au doyenné et dont nous avons â l'époque conçu tous deux l'aménagement, abrite à lui seul 22 associations ? Il faudrait évoquer vos conseils avisés, tant sur le plan juridique que sur le plan humain. Il faudrait parler du Collège : vous avez présidé le Conseil d'Administration et l'Assemblée Générale de son asbl. Durant de longues années, soucieux là aussi de contribuer à préparer l'avenir, grâce à l'enseignement de qualité donné au fil des années à tant de jeunes.. .Et je n'oublie pas les Anciens, car là aussi il y avait une flamme à entretenir et vous l'avez fait avec zèle et enthousiasme.
On n'en finirait pas, vous le voyez d'énumérer vos actes, vos choix, vos engagements... Et je devrais parler de votre vie professionnelle au cours de laquelle vous fîtes preuve de tant de compétence, de droiture, de dévouement. Derrière tout cela, un seul et unique désir était sous-jacent : servir. Servir Dieu et le prochain, en se référant aux valeurs fondamentales sur lesquelles notre civilisation s'est construite, en les vivant surtout... C'est ce que vous enseignez partout, à commencer par votre proche famille, qui a su si bien tirer les leçons des exemples que vous avez donnés par votre manière droite et rigoureuse de mener votre propre barque... Vous avez traversé des épreuves, je pense à votre enfance, votre jeunesse, à l'abnégation dont vous fîtes preuve durant la guerre, et enfin aux derniers mois de votre vie, que vous avez pu, fort heureusement, vivre chez vous, entouré, encouragé et compris jusqu'au bout.
Je n'ai pas tout dit, loin de là, nous sommes tellement nombreux à avoir une place dans votre cœur, et je veux dire ici à Madame Delannoy, aux enfants et petits-enfants, que malgré tout ce monde qui avait sa place dans le cœur et dans le temps de Monsieur Delannoy, ils y avaient eux aussi une énorme place... Monsieur Delannoy avait beaucoup de pudeur et se livrait peu à cet égard, mais ce qu'il m'a dit à plusieurs reprises me permet de formuler cette affirmation sans l'ombre d'une hésitation. Ajoutons qu'il a enseigné aux siens à faire fructifier les talents reçus du Seigneur. Et cet enseignement, il a été le premier à le concrétiser. Je ne sais pas combien il avait reçu de talents au départ, mais je sais qu'il en a aujourd'hui beaucoup à remettre entre les mains du Seigneur. Il n'a pas lésiné sur sa peine. Peut-on imaginer un instant que Dieu ne dira pas à cet homme de foi et de devoir : « C'est bien, bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton Maître » Il est appelé désormais à être heureux et à l'être en plénitude parce que son cœur était pur... La pureté de cœur dont Jésus nous parle ne serait-elle pas à chercher, en effet, du côté de cette totale disponibilité à Dieu et aux autres ?
Je vais, je crois, devoir en rester là... Car j'imagine Monsieur Delannoy, partant, après chacune de mes phrases, de ce petit rire quelque peu coquin par lequel il savait si bien relativiser les éloges, tire qui le rendait par ailleurs si jovial et qui savait aussi détendre l'atmosphère quand il en était besoin... Monsieur Delannoy, le mot par lequel je vais terminer cette homélie, je voudrais, si tant est que ce soit possible, le prononcer d'une façon qui soit à la fois simple et solennelle. Ce mot, c'est : merci.
Sources :
- Scoutopedia - 2019
- Annales CRAE -Tome XXIX - pp. 306-312 ; Tome XXIX - pp.317-321 ;Tome XXXIX - pp. 203-221.
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