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A la découverte d'Enghien par d'autres chemins

A la recherche des grands arbres verts de Wallonie

 

Le fameux parc d’Enghien

 

Située à mi-chemin entre Ath et Bruxelles, la bonne ville d'Enghien possède, depuis 1986, un parc qui figurait jadis parmi les plus beaux d'Europe. Parcourir l'histoire de cet espace arboré, c'est aussitôt se convaincre de la vanité et de l'espérance qui se succèdent sans trêve au chevet de toute œuvre humaine. Voici cette histoire esquissée au pas de charge, car le temps nous est compté.

L'origine du parc remonte au 15e siècle, lorsque Pierre de Luxembourg l'entoure d'une enceinte longue de 4 km et procède aux premiers aménagements de ce qui allait devenir « le fameux parc d'Enghien ». Après de nombreuses vicissitudes, le parc atteint l'apogée de sa splendeur aux 16e et 17e siècles grâce à la maison d’Arenberg : le voici promu « l'un des plus beaux prospects qui se puisse rencontrer dans les plus rares jardins de l'Europe ». Ces jardins, non moins de trois hectares de verdure et de fleurs, feront se pâmer Mlle de Montpensier, laquelle avait appris à s'y connaître dans l'orbite du Roi-Soleil : « Nous étions tellement entêtés de la beauté de ce jardin qu'après en avoir parlé comme d'un miracle, tout le monde eut envie d'y aller ; les ministres y allèrent et en revinrent enchantés... » Mais toute gloire est éphémère et l'occupation française allait précipiter la débâcle : troupes et cavaliers vont et viennent tandis que la Marine fait abattre les plus beaux arbres pour les besoins de la flotte impériale. Récupéré en 1803, le parc n'est plus que désolation et le toit de l'Orangerie, qui abritait une admirable collection de près de 500 sujets exotiques, fuit de toutes parts. Le parc va cependant renaître : dès 1804, plus d'un demi-million d'arbustes y sont plantés et l'Orangerie se repeuple de collections arrivées d'Angleterre en plein blocus, un exploit ! Quelques années plus tard, le duc Prosper décore ses serres de près de 1.700 variétés de fleurs et de plantes venues du monde entier. Le parc devient alors un modèle en la matière, tradition bien établie à Enghien puisqu’un enfant du pays, André Parmentier (1780-1847), allait créer des jardins aux Etats-Unis, aussi célèbres que le sont en Europe les jardins de Le Nôtre. La renaissance ne dura cependant que ce que durent les roses. En 1913, le domaine est mis en location au baron François Empain, mais cinq ans plus tard, l'armée allemande y aménage une plaine d'aviation. Les biplans partis, les 266 ha qui composent le parc sont alors vendus en 1924 au baron locataire, qui ne pourra le préserver des dégâts de la guerre de 1940. Le domaine tombe ensuite dans le plus lamentable abandon avant d'être scindé, suprême avanie, en deux tronçons par l'autoroute A8 (Bruxelles-Tournai). Survient enfin l'acquisition d'une grande partie du parc d'Arenberg par la ville d'Enghien, bien décidée à en sauvegarder l'unité et à proposer ce bel espace à l'enchantement des promeneurs. De grands arbres, de vastes perspectives, des bancs disposés à bon escient, une petite aire de jeux pour les bambins : tout concourt à favoriser une balade dominicale désormais paisible. Instructive aussi, car l'espèce des arbres est indiquée sur les plus remarquables d'entre eux. Du reste, un dépliant consacré aux arbres et arbustes du parc permet d'en découvrir les nombreuses essences. Des visites guidées sont par ailleurs organisées le troisième dimanche de chaque mois, entre Pâques et le 30 septembre.

De conception classique, le parc se caractérise par la présence d'un étang, d'un long canal, par le tracé des chemins en étoile et de longues drèves. A peine le seuil du parc franchi, l'étang du Miroir, le bien-nommé, se présente au visiteur.

Déjà apparaît l'un des arbres les plus remarquables du site, un pin noir d'Autriche, détenteur du record de son espèce en Belgique (3,92 m). Il suffit alors de longer les rives de l'étang pour rencontrer frênes, érables, platanes de belle venue et, surprise, un arbre peu courant, un chêne des marais fasciné par sa propre image dans les eaux lisses du Miroir. On peut ensuite rejoindre le château, auprès duquel poussent entre autres un cyprès de Lawson, un thuya géant de Californie et un tsuga du Canada, tous sujets dignes d'intérêt.

On se laisse alors gagner par le charme de la flânerie -les yeux ouverts- le long des drèves qui convergent vers le Pavillon des Sept Etoiles : Drève de la Patte d'Oie ou des Marronniers, Drève des Soupirs ou des Renards, laquelle conduit à la Porte de Bois, ombragée par d'impressionnants platanes d'Orient.

J'ai gardé pour la fin la Drève des Cerisiers qui conduit à la boucle du Canal, sur lequel erraient jadis de délicats esquifs berçant d'exquises courtisanes. Hélas, cette drève est fermée au public, fait d'autant plus affligeant que ma curiosité m'a poussé à passer outre une barrière pourtant explicite et à découvrir quelques-uns des plus beaux arbres que compte le parc. Parmi eux, le chêne préféré du duc Prosper d'Arenberg, qui en appréciait davantage la valeur monumentale que l'intérêt forestier, privilège qui valut à l'arbre d'être protégé au fil des ans et d'atteindre aujourd'hui une circonférence de 6,70m. Non loin se dressent deux superbes séquoias géants (6,80 m de circonférence, 40m de haut), dont les sombres silhouettes s'accommodent très bien des flamboiements automnaux d'un ginkgo biloba pleureur tout proche. De l'autre côté de la boucle, près de la Porte du Mail, se dressent encore plusieurs chênes dépassant allègrement les 6m de circonférence. Les eaux dormantes du canal forment en cet endroit une zone humide et solitaire où j'ai eu la surprise de croiser le regard stupéfait d'un... chevreuil ! Ce lieu mérite assurément d'être préservé, mais fait-il exclure l'accès aux séquoias, au gros chêne ? Voici une suggestion offerte aux autorités, dont le dévouement est par ailleurs admirable.

Faut-il préciser que l'ensemble du parc est classé, tout comme le centre historique de la ville, dont le patrimoine architectural rappelle lui aussi les splendeurs du temps jadis. Et comment mieux rejoindre la ville, sinon par le quartier du Vieux Cèdre, qui doit son nom à un arbre planté, dit-on au 17e siècle par le duc d'Arenberg. La cime a malheureusement été dégarnie par la foudre et la tempête en 1972, mais le tronc, d'un tour de 6,07 m à ma dernière visite, ne manquera pas de laisser un ultime souvenir aux enfants émerveillés que demeurent toujours les amis des arbres.

 

B. STASSEN / A.S.B.L. LE MARRONNIER
Rue du Colombier 21 -4690 GLONS

 

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